Frères Peladan
Adrien Peladan (1844 - 1885) - Josephin Peladan (1858 - 1918)
Adrien Peladan
Biographie chronologique du Docteur Adrien Peladan par le Dr Robert Séror.
1844 - Naiissance à Nîmes, Gard, Fr. le 18 juin.
1869 (25 ans) - Études à la Faculté de Médecine de Montpellier.
1869 (25 ans) - thèse à Lyon: Traitement homéopathique de la spermatorrhée, de la prostatorhée, de l’hypersécrétion des glandes vulvo-vaginales et des diverses formes de ces affections. Paris, In 8, 98 pages.
1875 (31 ans) - Il fonde une revue : L’ Homéopathie des familles et des médecins.
1878 (34 ans) - Publie chez Baillière : Traitement héroïque de la gravelle au moyen de médicaments spécifiques (Baillière, 1878).
1885 (41 ans) - Décès
Je cite mon ami, le Dr Olivier Rabanes :
…." Sa mort est un épisode tragique de la distribution des médicaments homéopathiques par un médecin : Peladan avale une trituration de strychnine en 1`° décimale pour l'essayer devant un malade. Il décède immédiatement.
Une controverse s'ensuit avec le fabriquant : la pharmacie W. Schwabe. Celui-ci n'a peut-être pas assez pris de précautions avant de livrer un toxique aussi puissant et qui de toute évidence aurait dû être dilué avant utilisation. "
1886 - Publication posthume de son ouvrage : Anatomie homologique. La triple dualité du corps humain et la polarité des organes splanchniques (Baillière, 1886)
Josephin Peladan
Le Sar Mérodack Joséphin Peladan, pseudonyme de Joseph-Aimé Peladan (ou Péladan), né à Lyon le 28 mars 1858, et mort à Neuilly-sur-Seine le 27 juin 1918, est un écrivain, critique d'art et occultiste français.
Biographie
Marcellin Desboutin, Sâr Mérodack Joséphin Peladan (1891), musée des beaux-arts d'Angers.
Issu d'une famille de cultivateurs et de commerçants, Joseph-Aimé Peladan, qui se donnera plus tard le prénom de Joséphin, est le fils de Louis-Adrien Peladan, journaliste à La France littéraire, fondateur de La Semaine religieuse et de Joséphine Vaquier. Son frère aîné, Adrien, futur médecin et érudit, l'instruit très tôt de toutes sortes de connaissances et, dès l'enfance, il voyage, à Avignon ou à Nîmes. Il manifeste un esprit indépendant qui lui vaut d'être renvoyé du lycée pour avoir traité un professeur d'athée, puis du petit séminaire de Nîmes.
Il entre comme employé au crédit Faillelle à Paris. Il voyage à Rome et à Florence où il se prend de passion pour le Quattrocento et pour Léonard de Vinci. De retour à Paris, il publie une nouvelle, Le Chemin de Damas, et entre à L’Artiste d'Arsène Houssaye, où il rédige des critiques d'art.
En 1884, il rencontre Léon Bloy et Paul Bourget et enthousiasme Jules Barbey d'Aurevilly, qui préface son roman, Le Vice suprême en 1884. Ce livre empreint de romantisme et d'occultisme, qui met en scène la lutte de forces secrètes acharnées à détruire l'humanité, prend résolument le contre-pied du naturalisme de Zola, dont il dit « ce Porc-Zola, ce pourceau qui est en même temps un âne » ». Ce manifeste lui apporte une célébrité immédiate à 26 ans. Jean Lorrain le surnomme « le pélican blanc ». Il se fâche avec Léon Bloy, passe deux jours en prison pour avoir négligé de régulariser sa situation militaire et publie un très grand nombre de textes dont, en 1888, son livre le plus connu, Istar. Il se pare du titre de « Sar » et du prénom babylonien « Mérodack ».
Péladan, dont le savoir était plus brillant que solide, ne tarda pas à se dérober aux discussions qui le mettaient sur la sellette. (…) Il était alors grisé par le succès de son Vice Suprême et par la curiosité qu'il éveillait dans les salons, où il s'attachait à faire sensation. Le titre de Mage ne lui suffisant plus, il se promut Sar, ce qui signifie Roi en assyrien.
Il était parfumé des sept parfums correspondant aux sept planètes, mais où dominait impérieusement l'eucalyptus. Un large col de dentelles sans cravate entourait son cou, mais s'échancrait assez pour recevoir un gros bouquet de violettes; ses gants de peau grise avaient des baguettes mauves à rehauts d'or.
Ces surnoms et ces préférences vestimentaires - « drapé d'un burnous noir en poil de chameau filamenté de fils d'or, en velours vieux bleu, botté de daim, et, comme Absalon, chevelu […] la barbe ointe d'huile de cèdre » - , font de lui une cible des caricaturistes et des humoristes : il est surnommé « le Mage d'Épinal », le "Sar dîne à l'huile", « Platon du Terrail » ou encore « le Sar pédalant ». Rodolphe Salis ose le cruel « Artaxerfesse », qui lui vaut des poursuites de l'intéressé.
Quand il se prend de passion pour Wagner, il vient à Bayreuth vêtu d'un habit blanc, d'une tunique bleu ciel, d'un jabot de dentelle et de bottes de daim, avec un parapluie retenu au côté par un baudrier. Si la veuve de Wagner refuse de le recevoir en cet équipage, cela ne l'empêche pas de publier les opéras de Wagner en français avec ses annotations « en matière de thérapeutique pour désintoxiquer la France de son matérialisme ». Sans fausse modestie, il affirme : « J'ai conquis, à force de talents, peut-être de génie, le droit de ma pensée pleine, entière, et devant tous. J'ai six mille nuits durant valeureusement aimé la langue française ; je puis tout dire en français. J'y suis burgrave sans vasselage. »
Martinisme
En 1887 il fonde avec Papus, qui l'a vraisemblablement initié, et Stanislas de Guaita la première loge martiniste à Paris, rue Pigalle.
L'ordre et les Salons de la Rose-Croix
C'est à son frère Adrien (1844-1885), l'un des premiers homéopathes français, que Joséphin Peladan devrait son entrée dans une branche toulousaine de la Rose-Croix.
En 1888, Peladan fonde avec Stanislas de Guaita l'ordre kabbalistique de la Rose-Croix qui accueille aussi Papus et Charles Barlet. Prétextant un refus de la magie opérative, il se sépare du groupe en 1891 pour fonder l'ordre de la Rose-Croix catholique et esthétique du Temple et du Graal. Il compose la formule « Ad Rosam per Crucem ad Crucem per Rosam, in ea in eis gemmatus resurgam - Non nobis non nobis Domine, sed nominis tui gloria soli, Amen » qui reprend une devise templière en lui ajoutant une note rosicrucienne (Comment on devient mage (1892). Cette formule sera reprise plus tard par d'autres mouvements rosicruciens.
L'année suivante, il organise le premier des Salon de la Rose-Croix, du 10 mars au 10 avril, à la galerie Durand-Ruel : « Ce jour, l'Idéal eut son temple et ses chevaliers, et nous, Macchabées du Beau, nous allâmes apporter à Notre-Dame, aux pieds de notre Suzerain Jésus, l'hommage du temple et l'agenouillement des Rose-Croix. »[réf. nécessaire] C'est un très grand succès. Soixante artistes y participent, dont nombre de peintres et sculpteurs de talent (Ferdinand Hodler, Fernand Khnopff, Jean Delville, Carlos Schwabe, Antoine Bourdelle). Vingt mille Parisiens et le Tout-Paris mondain et artistique, Stéphane Mallarmé, Émile Zola, Paul Verlaine, Gustave Moreau, viennent le visiter, au son du prélude de Parsifal et des Sonneries de trompette composées par Erik Satie. Plusieurs Salons de la Rose-Croix vont suivre de 1892 à 1897. Si plusieurs élèves de Gustave Moreau tels Georges Rouault ou ceux qui deviendront les nabis participent, certains artistes comme Edward Burne-Jones, Pierre Puvis de Chavannes ou Gustave Moreau déclinent l'invitation.
Ces Salons restent un des événements majeurs de la dernière décennie du XIXe siècle, ils font figure pour le renouveau de l'idéalisme et témoignent d'une tendance vers le spirituel qui anime les grands mouvements de l'art du début du XXe siècle.
Peladan ambitionne d'extirper la laideur du monde moderne, en s'opposant ainsi au matérialisme ambiant ; à ce titre, il est un porte-parole du mouvement symboliste. Il rédige plusieurs manifestes qui témoignent d'une grande culture artistique et une saisissante Réfutation esthétique de Taine qui accompagne son ouvrage majeur, L'Art idéaliste et mystique (Paris, 1894). Prônant une re-sacralisation de l'art et de la vie, Peladan opte délibérément pour un transfert du religieux vers l'art, dans la plus pure tradition baudelairienne. Son ton, les symboles choisis pour la Rose-Croix, ne relèvent plus vraiment d'un ésotérisme qu'on a souvent caricaturé, mais témoignent d'une volonté de s'opposer au trivial et inaugurent une pratique « publicitaire » que les avant-gardes exploiteront abondamment par la suite. Si Peladan utilise un ton souvent polémique ou lyrique, révélateur de son caractère passionné, c'est au service de convictions sincères et d'une défense de la grandeur de l'art qu'il estime prostitué sous une Troisième République souvent mercantile.